Spiritualité

Récits sacrés

À l’aide de son langage visuel original et révolutionnaire, Morrisseau a réinventé de nombreux récits sacrés qui lui avaient été racontés.

Après avoir quitté le pensionnat, Morrisseau retourne à Beardmore, près de la Première Nation de Bingwi Neyaashi, pour poursuivre son apprentissage auprès des personnes gardiennes du savoir, dont son grand-père.

Je suis rentrée chez moi et j’ai vécu à nouveau avec ma famille, réapprenant certaines choses, renforçant celles que je ne voulais pas perdre. J’ai continué à parler ma langue autochtone. Il a fallu huit mois à mon frère pour se remettre à parler l’ojibwemowin.

Art of Norval Morrisseau, 1979, p. 42.

Transmises à Norval Morrisseau par son grand-père, Moses Potan Nanakonagos, les récits-médecine figurent dans son art comme une forme de narration visuelle, tout comme dans le livre qu’il a rédigé et publié en 1965, Legends of My People: The Great Ojibway.

Les récits-médecine varient considérablement d’une région à l’autre de l’Anishinaabeg Aki. Pour obtenir plus d’informations, mieux vaut consulter une personne gardienne du savoir traditionnel, une personne aînée ou une personne-médecine.

En 1958, Morrisseau dessine ce groupe de personnages vêtus de robes rouges avec des capuches pointues et des badges en étain en forme de croissant de lune. Morrisseau intitule le dessin Wugeesh - Gukawiininwuk. Au dos, il inscrit « le peuple du ciel.L’Ojibwe People’s Dictionary utilise le terme « giizhig » pour désigner le ciel.

Les Ojibway croyaient que le ciel était composé de six couches… Les Ojibway ou les gardien-ne-s autochtones qui portaient des vêtements rouges avec des capuches pointues comme des bonnets constituaient le Peuple du Ciel, celui qui gardait les cieux.

Norval Morrisseau, Legends of My People: The Great Ojibway, 1965, p. 119

Norval Morrisseau, Wugeesh - Gukawiininwuk

Norval Morrisseau, Ancestors Performing the Ritual of the Shaking Tent, 1958-61.

Cette œuvre ne représente pas une tente tremblante, mais bien une madoodiswan ou une tente de sudation. Morrisseau décrit la tente de sudation comme une « maison à vapeur qui ressemble à un bol renversé, faite de jeunes arbres et recouverte de peaux ou de toile, avec un sol tapissé de branches de cèdre… elle purifie le corps et l’âme… certains hommes-médecine s’en servaient pour parler au dieu aquatique, à l’Oiseau-Tonnerre ou aux serpents-médecine… »

Norval Morrisseau, Legends of My People: The Great Ojibway, 1965, p. 52.

Dans cette œuvre, les Wugeesh – Gukawiininwuk portent aussi des robes rouges et battent un tambour sacré.

Ce croquis et la description qui l’accompagne ont été créés par Morrisseau et partagés avec Selwyn Dewdney.

Selwyn Dewdney a consigné la description faite par Norval Morrisseau d’une tente de sudation ou madoodiswan. 

Un homme-médecine dans un bain vapeur 
Rituel pour se purifier 
Le corps et l’ombre des rêves ou (l’âme) 
Selon les Ojibway, chaque personne a une ombre  
Comme elle, l’ombre voyage dans les rêves.  
L’arbre ou la plante est le cèdre. Les arbres 
purifient les trois en raison de leur pouvoir de guérison et de purification. 
Les branches de l’arbre sont placées à l’intérieur du bain comme tapis pour s’asseoir. Un cèdre pulvérisé 
Brûle sur une pierre pour produire de la fumée comme l’encens dans les rituels d’église, une fumée qui atteint le monde surnaturel pour apaiser, purifier, solliciter des faveurs, etc.

Écrit par Norval Morrisseau à Selwyn Dewdney

Norval Morrisseau, Medicine Man in a Steambath, n.d.

    Morrisseau a souvent peint l’image de la tente tremblante dans son art. Il explique :

     Les Ojibway croient qu’un vent-médecine du ciel souffle dans la tente. C’est pour cela qu’elle tremble

    Norval Morrisseau, Legends of My People: The Great Ojibway, 1965, p. 70.

    Morrisseau explique que Mikkinnuk est une interprète.

    Norval Morrisseau, Birchbark Painting, 1973.

    Cette peinture, élaborée sur une feuille d’écorce de bouleau en 1973, représente une cérémonie de jiisaakan. Les contours sont rouges et le tchissakiwinini (le praticien de la tente tremblante) se trouve à l’intérieur pendant la cérémonie. Morrisseau utilise des lignes pour illustrer les vibrations. À gauche, Mikkinuk, la Grande Tortue, apparaît avec des lignes de puissance qui émanent d’elle et deux cercles fragmentés la relient à jiisaakan, signe d’un équilibre dans le monde naturel et dans le monde spirituel. 

    Dans cette toile, Morrisseau illustre jiisaakan comme une partie du corps ou de la carapace de Mikkinuk. La porte correspond au cœur de la tortue. Le tableau est encerclé de faisceaux d’énergie alors qu’une figure spirituelle pénètre par la bouche ouverte de Mikkinuk.  

    Norval Morrisseau, Sacred Turtle Shaking Tent, 1969.

    Norval Morrisseau, Untitled (Giants Travelling), 1989.

    Le dessin, achevé plus tard dans sa carrière, reprend de nombreux éléments narratifs mis en œuvre par Morrisseau à ses débuts. À ce stade-ci, l’artiste ajoute des descriptions visuelles plus détaillées des lieux, notamment des montagnes et des arbres, et recourt à une plus grande profondeur de champ.

    L’image est dessinée en étages. Au bas de l’image se trouvent des poissons sacrés et des tentes tremblantes. Sur la Terre se trouve des figures d’ancêtres et, au-dessus, des figures géantes avec des coiffes chamaniques surplombant les montagnes et connectées au ciel. 

    L'exposition rétrospective de Morrisseau au Musée des beaux-arts du Canada en 2006 comprenait trois œuvres de Morrisseau sur les histoires sacrées. De gauche à droite : Sans titre (Horned Snake Ojibway Medicine Society) c. 1958-61; Sans titre (Serpent) c. 1962; Ancestors Performing the Ritual of the Shaking Tent, c. 1958-61. Avec l'aimable autorisation du Musée des beaux-arts du Canada.

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